(OS) Fiction

YoSeob tient la main de DooJoon. Il ne sait pas qu'elle s'est refermée sur le vide, comme depuis des mois. Lui, il la sent encore, la chaleur de son amant. Il sourit. Il n'y a qu'avec lui qu'il aime tant être. Qu'il n'a plus peur de rien. Même des gens dehors, même du bruit la nuit. Bien que le grand brun à ses côtés ne parle pas. Il fera de même. Ils n'ont pas besoin de ça pour être heureux, YoSeob en est convaincu. Tant qu'il saura qu'il est là, il sait qu'il s'en contentera, parce que sa seule présence est source de tant de choses à ses yeux.
Il lève la tête vers son compagnon et ne le distingue que très vaguement. Il se dit que peut-être, il aura du dormir plus cette nuit, et ses yeux n'auront pas été brumeux. DooJoon ne sourit pas. Le plus jeune en a un pincement au coeur. Il voudrait le voir autrement que le regard plongé dans le vide. Alors il accélère le pas en se concentrant sur le béton sur lequel ils marchent en rythme. Il soupire bruyamment, espérant une réaction qui ne viendra jamais. Il le savait. Finalement, il se demande s'il a vu son petit ami épanoui ne serait-ce qu'une fois. Même lorsque ses doigts courraient sur les touches du grand piano trônant dans le salon, il avait cet air de mélancolie collé au visage. Et les mélodies étaient toujours tristes. Pourtant, YoSeob aimait fredonner dessus. Il ne s'en rendait pas compte, à l'époque. Mais maintenant, DooJoon a arrêter de jouer. Ils ont tous les deux oublié depuis quand.
Il se dit qu'il ne faut pas qu'il pleure, qu'il n'est plus un enfant, et que son amoureux aurait pitié de son comportement. Alors il ne dit rien, comme toujours. Mais à l'intérieur, il a mal. Très mal. Peut-être trop. C'est comme un étau qui compresse son organe vital. Il n'a jamais vécu cette situation, mais il s'imagine facilement que la douleur est semblable. Il grimace et pose sa main sur son coeur, ferme le poing. Les enfants autour d'eux crient, courent. Ils vivent. Pour eux, au contraire, le temps s'est arrêté, figeant éternellement les aiguilles de l'horloge, faisant de chaque jour un recommencement. Tout à accomplir de nouveau à chaque réveil, tant pis c'est c'est la même chose que la veille. Qui s'en souci?
Lui aussi, il veut s'émerveiller devant les choses les plus stupides, embrasser furtivement son compagnon sans faire attention aux regards des autres. Il rougit face à ces pensées enfantines. Il se demande depuis quand DooJoon n' a pas posé ses lèvres sur les siennes. Depuis quand ses mains se sont aventurées ailleurs que dans les siennes, depuis quand ses doigts n'ont pas filé sur sa peau de bébé. Il secoue la tête. Peut-être qu'il a fini par lasser son partenaire, que ses attentes ne sont plus les mêmes. Que tout est de sa faute, après tout. Mais lui, il ne veut pas le laisser partir. Il n'y arriverait pas sans lui, il en a la certitude. Parce que DooJoon est son pilier, qu'il ne peut même pas s'imaginer avancer sans lui.

Ils sont arrivés au centre commercial. La foule l'étouffe. Le bruit l'assomme, et les lumières lui déchirent le crâne. Mais il veut rester là, s'il n'est pas seul.
Et puis YoSeob court devant une vitrine illuminée, lâchant la main de son âme soeur. Il rit à s'en déchirer la gorge, l'admire avec les yeux brillants. Quand il se retourne, DooJoon a disparu depuis longtemps.